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1.3.1.  Dépasser la simple mise à disposition de textes

1 Commenter le paragraphe 1 2 Depuis quand numérise-t-on édite-t-on les sources en histoire de l’art ? Quelles évolutions ?

1.3.1.1.  Deux siècles de tradition d’édition des sources

2 Commenter le paragraphe 2 2 En sciences humaines, l’édition des sources est une pratique traditionnelle de l’activité érudite, dont les fondements remontent au XVIIe siècle. Héritage d’une tradition pluri centenaire, l’édition des sources est soumise à des règles disciplinaires précises : outils d’analyse, méthode d’établissement des textes, types d’apparat…

3 Commenter le paragraphe 3 2 La forte activité éditoriale autour de la diffusion des sources au cours du XIXe et XXe siècles s’est structurée autour de grands programmes éditoriaux, en nombre réduit, mais couvrant des champs considérables. De ce fait, la pratique était strictement définie et attachée à des acteurs spécifiques : l’éditeur scientifique, chargé de l’analyse des sources et l’éditeur matériel, responsable de concilier sur le support la transcription du document ancien et les apports de la recherche.

4 Commenter le paragraphe 4 3 Ainsi, l’édition de source devait se fondre dans un moule formel, régi par des usages et codes partagés par tous, qui garantissaient la lisibilité et la commodité de ces entreprises. En revanche, cette structuration stricte écartait certains documents plus complexes (brouillons, compilations) et obligeait systématiquement au choix d’une version du texte au détriment des autres (dans le cas de plusieurs remaniements d’un texte) en raison, notamment, du format obligatoirement limité de l’édition papier.

5 Commenter le paragraphe 5 1 Dans le domaine spécifique de l’histoire de l’art, une érudition documentaire basée sur l’édition de source émerge et se développe dans la seconde moitié du XIXe siècle. Certains historiens, à l’instar de l’Abbé Requin, de Charles-Philippe de Chennevières ou Jules Guiffrey publient en masse des documents anciens. À cet égard, l’entreprise de publication des Archives de l’art français, lancée à partir de 1851 est emblématique : à une fréquence soutenue, elle publie tout ce qui concerne les commanditaires, les artistes ou les œuvres. Il convient également de citer le manuel de Julius Von Schlosser, La littérature artistique, manuel des sources de l’histoire de l’art moderne, publié en 1925 qui demeure aujourd’hui encore une référence incontournable de l’historiographie.

1.3.1.2.  Les possibilités offertes par le numérique

6 Commenter le paragraphe 6 0 Dans le contexte de l’édition de sources, les possibilités du média numérique ont très tôt été envisagées et ont profondément renouvelé les manières de mettre à disposition les sources. Cependant, les conventions de l’édition électronique sont loin d’être fixées.

7 Commenter le paragraphe 7 0 Dans les années 70, des textes littéraires ont été intégralement saisis pour faciliter les analyses lexicales ou linguistiques automatisées. À l’époque, il ne s’agissait pas encore de proposer une offre adaptée à la lecture.

8 Commenter le paragraphe 8 3 Ce n’est qu’à partir des années 2000 qu’a commencé à émerger un véritable champ de l’édition scientifique électronique qui envisage d’en exploiter toutes les potentialités. Celle-ci a remis en cause les pratiques que deux siècles d’édition de sources semblaient avoir définitivement entérinées.

1.3.1.3.  Numérisation et édition : de la simple mise à disposition…

9 Commenter le paragraphe 9 1 L’informatique et internet ont aussi ouvert la voie à de nouvelles manières de diffuser les sources. Le projet Gutenberg, lancé en 1971 reposait sur la transcription manuelle de textes tombés dans le domaine public. Le relais a été pris par les institutions patrimoniales, au premier rang desquelles les bibliothèques, qui ont largement proposé, à partir du milieu des années 2000, des bibliothèques numériques. L’offre de celles-ci s’est étoffée à mesure que les possibilités techniques s’étendaient. Ainsi, à la numérisation par « image » des ouvrages physiques s’est ajoutée la mise à disposition des flux textuels, grâce à la généralisation des technologies dites d’OCR (reconnaissance des caractères). Cette technologie n’est cependant pas performante sur les textes manuscrits et les typographies anciennes, où, si elle n’est pas tout simplement impossible, elle fournit des transcriptions très erronées.

10 Commenter le paragraphe 10 1 La transcription, automatisée ou non, est devenue un des enjeux importants de la numérisation, la mise à disposition d’un fichier texte facilitant la lecture, l’étude, l’interprétation, et la recherche d’information. En effet, il est impossible d’effectuer une recherche plein texte dans un document type « image ».

11 Commenter le paragraphe 11 4 Il ne s’agit là que de mise à disposition des sources, proposées sous des formats numériques (JPEG, PDF, TXT) et non d’édition critique telle que pratiquée traditionnellement dans la publication des sources pour l’histoire de l’art. Comme nous l’avons dit, les formes habituelles du travail éditorial se sont trouvées profondément remises en cause par l’irruption du support électronique. L’édition des sources via la transcription inclue de décrire le contenu textuel, la structuration de l’information et l’apparence visuelle du document original. C’est donc un travail de déchiffrement et d’encodage, c’est-à-dire de traduire le contenu dans un langage de représentation informatique, par conséquent interrogeable par la machine.

12 Commenter le paragraphe 12 2 Depuis les années 1990, la Text Encoding Initative s’est imposée comme le principal standard pour l’édition scientifique numérique : elle fournit un cadre d’encodage et de sauvegarde, qui assure la pérennité et l’interopérabilité de la ressource. Il faut ici souligner que l’encodage en XML-TEI relève déjà de l’édition critique puisque l’adoption d’un schéma d’encodage résulte de choix éditoriaux.

1.3.1.4.  Ce dont le monde de la recherche a besoin

13 Commenter le paragraphe 13 2 Si la mise à disposition d’importants corpus de sources par les entreprises de numérisation menées par les bibliothèques et les archives est à saluer, il est manifeste que les besoins de la recherche en matière de documents numériques sont en train d’évoluer et que l’on ne serait plus se contenter de simple mise à disposition d’images de documents ou de flux textuels.

14 Commenter le paragraphe 14 1 En effet, aujourd’hui, les chercheurs ont besoin de corpus malléables et réutilisables, qu’ils puissent exploiter avec leurs propres outils (instruments statistiques, visualisations).

15 Commenter le paragraphe 15 2 Il faut également pleinement profiter des avantages du numérique et dépasser le livre homothétique légèrement amélioré (recherche plein texte, partagabilité). Pour cela, il faut accepter de briser la structure linéaire du codex pour lui préférer une structure à multiple point d’entrées. Le texte doit être vu comme une base de données. Mais plus encore, il faut repousser les limites du texte en l’enrichissant par des liens hypertextes renvoyant vers d’autres contenus (textuels, visuels), et des annotations critiques. Ces pratiques peuvent être collaboratives et évolutives, s’inscrivant dans une économie nouvelle de la contribution, qui passe, notamment par le crowdsourcing.

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Source :http://johannadaniel.fr/memoire/?page_id=47